Le feedback Part 4

Une « recette de comm »

 

 – Un joueur de football: « J’en ai marre, le coach me fait jouer sur le côté gauche, je n’ai pas de repère, moi j’aime jouer dans l’axe, je veux marquer des buts mais il me dit que c’est pour le bien de l’équipe »

Un coéquipier: « Tu n’as qu’à aller lui parler et lui dire franchement ce que tu penses! »

Le joueur: « Ok, je vais aller le voir mais je sais que cela ne sert à rien. Il ne m’écoute jamais. Je vois bien qu’il ne m’apprécie pas. De toute façon, il n’écoute personne ».

Quelques jours plus tard, le joueur dit a son coéquipier:  » j’ai essayé de lui dire que je préfère jouer dans l’axe mais comme d’habitude, il ne m’a même pas écouté. Alors, je me suis emporté et la discussion a dérapé. »

         Face à un échange qui s’annonce houleux et engagé, les enjeux de la discussion à venir portent davantage sur la nature de la relation que sur son véritable contenu. En effet, si la relation est bancale, un feedback inapproprié peut rapidement accoucher de quiproquos, de méprises et de confusions pouvant même générer une future altercation. Pour un coach, il apparait donc important de garantir une communication saine, interne et frontale afin que chacun puisse critiquer de façon objective et constructive. Sans cela, il ne faudra plus s’étonner d’entendre les revendications des insatisfaits dans les médias et autres réseaux sociaux. Si la discussion n’est pas ouverte dans un vestiaire, et si en interne, on ne peut pas dire ce que l’on pense, alors les footballeurs au narguilé ne cesseront de sévir sur la toile. En révélant les problèmes internes au grand jour et au grand public, l’absence de contrôle d’une communication ouverte et libérée peut, hélas, s’accompagner d’un cri médiatique aussi pathétique que révélateur d’ un manque cruel de réflexion, de recul, de finesse… et d’accompagnement individualisé.

 

Le R.D.E.P.C

 

        Le R.D.E.P.C est un des outils qui offre la possibilité de garantir un certain niveau d’écoute et de coopération malgré les difficultés de communication rencontrées. Cette technique du R.D.E.P.C. permet:

– d’entretenir ou d’améliorer la relation entre un entraineur et son sportif.

– se défaire des préjugés ainsi que des pensées limitantes et négatives.

préparer une argumentation objective par un meilleur choix des mots afin de faciliter l’échange en rendant les propos plus compréhensible.

         Cet outil est inspiré du D.E.S.C, auquel il convient d’ ajouter une étape préalable permettant de mieux coller à la réalité. Les auteurs du D.E.S.C n’ont en effet pas considéré l’impact de nos émotions, de nos croyances, de nos valeurs, de notre vécu… sur notre manière de communiquer ainsi que sur la nécessité de prendre en compte l’aspect temporel de nos affects.

         Parfois (souvent? toujours?), mieux que d’engager une discussion vouée à des mots risquant d’entrainer des maux, il est préférable de la reporter. Ainsi, l’échange sera probablement mieux préparé, certainement plus juste mais surtout, ce sera l’occasion d’adopter une position plus distanciée, et de fait, bien moins emprunte à l’expression des émotions. La posture choisie serait de prendre du temps tout en maintenant à distance notre petit diablotin intérieur; cette petite voix ruminante qui ne manque jamais de nous marteler que la situation n’est pas comme l’on souhaiterait qu’elle soit.

 

          Le protocole du R.D.E.P.C

 

R: Reporter dans le temps

  Si le début de l’échange, les mots, le ton et le « body language » de votre interlocuteur laissent penser que le débat risque de s’envenimer, autant que faire se peut, il convient de « R » (reporter) la discussion à un moment plus approprié. « A chaud », les émotions ressenties peuvent contrarier l’objectivité de tout raisonnement objectif et sensé.

 D: Décrire les faits

  Décrire les faits, rien que les faits. Evoquer des faits aussi réels que précis permet d’éviter toute interprétation ou jugement erronés. Par nature, lorsqu’ils sont prouvés, les faits sont indiscutables. Cette prise de distance vous conduira à analyser la situation avec un regard neutre et extérieur. Dans certaines situations complexes, elle permettra également de parvenir à relativiser les faits. En ce sens, c’est un pas vers l’autre.

E: Exprimer ses sentiments

  Exprimer les sentiments, les préoccupations, les pensées, les désaccords ou encore les critiques que cette situation/conflit fait naître en vous. Employer le « je » plutôt que le «tu/vous » rétablira la sincérité de la relation et pourra amener l’autre à résipiscence. En se mettant à votre place, par empathie, l’autre pourra ainsi mieux accepter ce que vous ressentez.

 P: Proposer des solutions

  Proposer une solution réaliste et convenable. Ce comportement vous mettra en posture de propositions. Pour garantir un échange sain et juste, l’autre aura également la possibilité de suggérer ses solutions en retour.

 C: Conséquence positive

  Ensuite, il conviendra d’intéresser l’interlocuteur en l’intégrant à l’élaboration d’une solution commune et en lui indiquant les conséquences positives qui découleraient des solutions envisagées en commun. En soulignant les bienfaits réciproques des solutions communes envisagées, l’échange est orienté vers un aboutissement positif. Il s’agit de trouver un accord par lequel chacun se préoccupe aussi de l’intérêt de l’autre, d’une façon également favorable à son propre intérêt. En d’autres termes, cela correspond à du « WIN-WIN ».

 

         Lorsque nous sommes confrontés à une discussion conflictuelle ou face à une personne détestable, l’agacement et les émotions négatives qui en découlent, ont des répercutions néfastes sur notre manière de communiquer. Ainsi, nos émotions peuvent nous éloigner de la rationalité et de nos capacités à bien communiquer (écoute, argumentation, langage verbal et non verbal). Le R.D.E.S.C. est une manière de communiquer efficacement lorsque le comportement d’une personne vous pose un problème et que vous souhaitez le faire évoluer. En maintenant une confiance réciproque, le R.D.E.S.C. permet de garder un niveau de collaboration satisfaisant.                   Porté par un instinct de survie primaire, trop fréquemment hélas, nous adoptons un mode « automatique défensif » alors qu’il conviendrait d’opter pour un « mode adaptatif positif », qui consiste à s’adapter à la situation stressante et bloquante. En appliquant une « logique argumentaire », nous orientons notre façon de communiquer afin d’aboutir à une issue positive. Les récentes études sur l’imagerie cérébrale indiquent que lors d’une situation conflictuelle, nous sollicitons une zone de notre cerveau peu propice à la bonne gestion du stress. Reporter la discussion/conflit dans le temps amènerait à remobiliser les zones du cerveau favorables à la réflexion, à la distance, au recul et à l’écoute. Ce report permettrait d’avoir une position distanciée plus mesurée, moins sujette aux émotions négatives.

 

 L’espace détente du « oui ok, mais… » des détracteurs habituels

          Comme chaque outil existant, le R.D.E.S.C. n’est en rien, une garantie absolue de la résolution des discussions conflictuelles. Par exemple, comment procéder si l’interlocuteur refuse l’échange? s’il refuse de reporter l’échange pour en « découdre maintenant »? si les rancœurs sont plus fortes que la raison et le bon sens? si l’inimitié est telle qu’il refuse d’échanger avec un imb…le.

Dans le quotidien de chacun, les discussions conflictuelles ne manquent pas, alors faites de chacune d’elles, des occasions d’expérimenter cette technique du R.D.E.S.C.Une fois maitrisée, vous serez surpris par son efficacité et par les changements que cela procurera en vous et pour vous. Ensuite, nous parlerons body language…car votre corps parle plus que vos mots.

 

Clément Durou

 

 

 » La critique, comme la pluie, devrait être suffisamment douce pour nourrir le développement de l’homme sans détruire ses racines. »  Frank A. Clark

 

(1) Sharon A. & Gordon H. Bower , 1976. Asserting yourself. A practical guide for positive change.

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