Le stress du sportif, tu sais ce que c’est?
4ème partie
Qu’est ce qu’un préparateur mental peut apporter en plus ?
Si l’entraineur n’a pas le temps, la volonté, ou bien s’il n’a pas été formé ou sensibilisé à la préparation mentale et qu’il souhaite déléguer cette fonction à une personne formée et qualifiée en préparation mentale, il peut faire appel à un préparateur mental diplômé. Depuis quelques années, il existe des formations diplômantes en préparation mentale dans plusieurs universités françaises. Ces personnes diplômées sont compétentes pour vous aider à préparer mentalement vos joueurs, n’hésitez pas à faire appel à un préparateur mental, vous découvrirez très probablement de nouvelles perspectives déterminantes de la performance de vos joueurs.
Quels outils utiliser pour aider les footballeurs à gérer le stress avant, pendant et après un match?
Avant de commencer, il est important de préciser qu’il n’est pas nécessaire de « lutter » contre le stress ou également de souhaiter le faire disparaitre (c’est ce que l’on entend souvent dans la bouche des entraineurs, parents…). Ceci, pour 2 raisons. La 1ère, nous l’avons évoqué, il existe un bon stress (« eustress » qui mobilise l’énergie et la concentration du footballeur) et la 2ème est que si l’on souhaite s’attaquer frontalement au stress en voulant le faire disparaitre et l’anéantir définitivement, alors nous avons toutes les chances de perdre ce combat. En revanche, la ruse, les techniques, le contournement, l’évitement, le jeu, le sens et la compréhension s’avèrent bien plus pertinents et efficaces si l’on veut faire de son stress, un allié. Dans ces cas-là, je préfère dire au joueur que j’accompagne, que nous n’allons pas nous battre mais plutôt jouer avec son stress. Selon moi, un joueur qui affirme ne jamais stresser avant un match important est un menteur. Un joueur qui stresse trop ne peut être performant. Un joueur qui apprivoise, régule, maitrise et joue avec son stress a toutes les chances d’optimiser ses performances futures.
La liste suivante n’est pas exhaustive mais voici quelques-uns des différents outils que j’utilise afin d’optimiser la gestion du stress des footballeurs que j’accompagne.
Est-il utile de préciser que je n’utilise pas tous ces outils pour un seul joueur? L’objectif est d’abord d’identifier les exercices et outils qui correspondent le plus au joueur (son profil, son expérience, le moment de la saison, le parcours…) et ensuite, après son accord, commencer le travail mental. Autre point important, une technique de préparation mentale peut fonctionner pour un joueur, et pas pour un autre. D’un joueur à l’autre, la réponse du préparateur mental sera nécessairement toujours différente, individualisée et spécifique. Ainsi, il ne me semble pas cohérent de proposer à tous les joueurs, le même travail. Par exemple, pour accélérer les processus de récupération/relaxation, tous les joueurs ne vont pas adhérer à la sophrologie. C’est une des raisons qui me font affirmer qu’un sophrologue n’est pas un préparateur mental. J’entends déjà les personnes concernées crier leur mécontentement. Je n’ai absolument rien contre la sophrologie. C’est un outil que j’utilise mais cela ne reste qu’un outil parmi beaucoup d’autres. J’aurai exactement le même discours avec les professeurs de yoga, de méditation, les psychologues, les kinés, les médecins, les coachs certifiés en PNL, mais également tous les sans formation qui s’autoproclament préparateur mental.
Les différents outils utilisables
– Travail du contrôle de la respiration (abdominale, en carré, profonde, dynamisante, relaxante, en accordéon) et de relaxation (sophrologie, sophronisation de base pour la récupération des joueurs); accompagné d’audio de mindfulness (pour travailler la concentration et la présence dans l’ici et maintenant) et un travail d’imagerie mentale avec ancrage de ressources (calme, confiance, maitrise de l’environnement compétitif, ancrage des expériences de réussite…).
– Routine de pré-performance (avant le match, la mise en place d’une routine individuelle et/ou collective, met à distance le stress, évite la rumination, permet de se préparer, de s’activer, de se motiver, de prendre confiance). Si je suis pleinement occupé à faire quelque chose, alors je ne peux pas penser à autre chose. C’est le principe du » s’occuper pour ne pas se préoccuper ». La routine de performance est un excellent outil pour gérer le stress et décupler la motivation, la confiance et l’activation des joueurs. Attention cependant à bien respecter les principes fondamentaux de la routine car une routine mal conçue peut être néfaste à la performance du joueur en produisant l’effet inverse.
– La fixation d’objectif: les outils comme le SMART, le DOCOD, ou encore le questionnaire d’objectif permettent de fixer des objectifs (positifs, concrets, atteignables, motivants, individualisés, mesurables) de réalisation, des objectifs de compétence, des objectifs de performance et non des objectifs de résultats. La fixation d’objectifs est un des moyens pour écarter le stress, développer la motivation intrinsèque et extrinsèque, la concentration et l’activation des joueurs.
– Le « dialogue interne – vers le + » ; l’auto-persuasion positive, l’autohypnose permettent une meilleure gestion des croyances négatives, polluantes, limitantes et donc…stressantes.
– Le SWITCH, le focus et la bascule attentionnelle, le ZOOM, le « faire comme si… » et le body language (car chacun sait que l’esprit impacte notre corps mais peu savent que l’inverse est aussi vrai. Notre corps peut influencer notre esprit. Un exemple? pensez à quelque chose qui vous agace, puis forcez-vous à sourire et observez ce qui se passe en vous. Cela ne marche pas? recommencez, recommencez…le résultat est garanti.
– Différents exercices de PNL (programmation neurolinguistique) entification des indicateurs d’apparition de stress, du doute et des pensées négatives. Apprendre à reconnaitre l’apparition de son propre stress.
– l’entretien d’explicitation, le débriefing d’entrainement et de compétition (évocation des points positifs, ceux à améliorer…) puis (re)fixation d’objectifs afin d’encore progresser.
Chers entraineurs, vous avez à présent tout compris??? Alors à présent, jouons…
Pour s’amuser un peu, je vous propose un petit jeu. Je vais vous présenter plusieurs cas concrets auxquels j’ai été confronté. A votre tour, vous allez devoir me dire comment vous vous y prendriez pour régler ces situations problématiques.
1) Depuis quelques matchs, votre buteur ne marque plus, il rate beaucoup d’occasions devant le but et vous remarquez que ces partenaires ne lui font plus confiance et hésitent avant de lui faire la passe. Malgré cela, vous avez l’impression qu’il vit bien la situation et n’a pas de comportements étranges lorsqu’il est avec le groupe. Que faites-vous?
2) Avant un match, certains de vos joueurs vont souvent aux toilettes. Que faites-vous?
3) Avant un match, un de vos joueurs a mal au ventre et il transpire plus que d’habitude, un autre dit que son cœur bat plus anormalement vite, un autre dit qu’il ne dort pas bien depuis 3 jours, un autre. Que faites-vous?
4) Avant un match, un joueur vous dit qu’il a peur de passer à côté de son match et de faire perdre l’équipe. Il n’arrête pas de se dire qu’il va encore faire des erreurs? Que faites-vous?
5) Dans la semaine qui précède un match à enjeu, vous remarquez que la relation entre vos joueurs se dégrade. Vous sentez une certaine tension, rien de grave mais vous vous rendez compte qu’ils ne sont pas comme d’habitude. Que faites-vous?
6) La veille d’un match, un joueur vient vous dire qu’il ne souhaite pas joueur la rencontre. Vous pensiez le titulariser mais en discutant avec lui, il vous dit qu’il a une petite douleur derrière la cuisse. Que faites-vous?
7) Lors de la préparation d’avant saison, lors des jeux d’opposition, vous remarquez que la tension monte car certains joueurs mettent « trop » le pied à l’entrainement. Que faites-vous?
8) Vous êtes entraineur, dans la semaine précédant un match important, vous remarquez que vous n’êtes pas « comme d’habitude ». Votre petite voix intérieure vous dit que votre équipe va perdre, que les adversaires sont trop forts…; vous vous sentez irritable et fatigué, vous n’avez pas d’appétit et personne de votre entourage ne vous comprend. Que faites-vous?
9) En début de saison, de nouveaux joueurs arrivent dans votre groupe. Vous remarquez qu’ils éprouvent des difficultés dans leur intégration. Que faites-vous?
Envoyez-moi vos réponses par mail à : clementdurou@gmail.com et je vous répondrai.
Conclusion
Un match de football est un évènement spécial, parfois extrême voire extrêmement spécial. Quel que soit « l’enjeu en jeu », sa préparation se caractérise souvent par une multitude d’incertitudes et d’interrogations individuelles ET collectives. Les questions générées par cette préparation précompétitive peuvent parfois se transformer en doutes, inquiétudes et peurs diverses…et les réponses apportées aux et par les joueurs ne sont pas toujours les plus efficientes.
Puisqu’elle peut être source de peurs puis d’échecs potentiels, dans certains cas, la compétition peut même être perçue par le joueur comme un danger car la seule issue reste binaire: la victoire ou l’échec.
Ainsi envisagée, la compétition peut bouleverser négativement la perception et l’analyse objective de la situation effectuée par un joueur stressé. En conséquence, la réalité de la situation du joueur telle qu’il l’a perçoit avec ses yeux embués par le stress, n’est pas toujours « LA VRAIE » réalité. Dans le mental des joueurs, cette perception de danger fait alors émerger bon nombre d’autres questions effrayantes générant des doutes, des craintes voire des peurs qui ne sont alors que des réactions normales face cette agression potentielle.
Ainsi, les peurs et les craintes issues d’une mauvaise gestion de ce stress entrainent une consternante représentation de l’obligation de performance, un impact négatif sur l’estime de soi, une chute de la motivation intrinsèque, une activation fluctuante, une concentration hasardeuse…et, de fait, représentent autant de dangers psychologiques pour le sportif.
Il semble aujourd’hui incontournable de devoir expliquer aux joueurs que leur stress est déterminant dans la réalisation d’une performance optimale sans oublier que l’intensité et l’orientation du stress varient d’un joueur à l’autre. Une fois qu’ils savent reconnaitre leur stress (arrivée des symptômes); qu’ils savent ce qu’est le stress, qu’ils comprennent que leur stress n’est pas que mauvais; qu’ils sont habitués à leur stress et qu’ils savent l’appréhender puis jouer avec leur stress, alors ils seront plus aptes à contrôler la montée de l’anxiété et à gérer leur pression à l’approche d’une compétition. Lorsqu’un joueur ne parvient pas à s’accoutumer aux agents stressants qu’il peut rencontrer dans son environnement sportif ( « surentrainement »= préparation physique trop lourde, lacunes technico-tactiques, tensions internes dans le groupe…), mais aussi dans « l’extra sportif » ( changement de club, de groupe, transferts, problèmes familiaux, sociaux, financiers…), pire que de réaliser une contre performance, ceux-ci peuvent entrainer un surmenage ou un épuisement que je surnomme un claquage physique ou mental.
La gestion du stress est un élément déterminant dans la préparation du joueur de football. Comme les autres habiletés mentales (motivation, concentration, attention…), savoir gérer (et non lutter contre) son stress est une habileté perfectible, modifiable et entrainable. Ainsi, un travail mental spécifique, individualisé et intégré offre la possibilité aux entraineurs, de préparer au mieux leurs joueurs afin qu’ils réalisent une performance optimale.
« La différence ne se fait plus seulement sur le travail technique, la tactique et la préparation physique. Le plus important pour la préparation des footballeurs aujourd’hui: c’est la Préparation Mentale » Claudio RANIERI
Clément Durou