La gestion du stress d’avant match 1ère partie

 

Le stress du sportif, tu sais ce que c’est?

Exemple en football  ( article découpé en 4 parties)

 

    Que l’on soit devant sa télé, autour d’un stade, au comptoir d’un café, tous les débriefings et analyses d’après matchs évoquent, à un moment, la pression ou le stress pour expliquer les raisons d’une contreperformance individuelle ou collective. Quel que soit l’enjeu du match, l’âge et le niveau de pratique des joueurs, la défaite d’un match que l’on prépare du mieux possible laisse souvent une profonde cicatrice psychologique dans la tête des joueurs et de leurs entraineurs. Aujourd’hui, la mauvaise gestion des émotions en présence du stress qu’apporte la compétition semble être la cause principale de la majorité des contreperformances au football.

    Tous les débriefeurs « brèvistes de comptoirs » évoquent le stress pour analyser un match et justifier le résultat, mais au fait, de quoi parlent-il  lorsqu’ils affirment que les joueurs n’ont pas su être à la hauteur de l’évènement? malheureusement, peu savent de quoi ils parlent.

    Du football amateur au football professionnel, s’il est bien une constante dans l’explication de la contreperformance ou la réussite (collective et individuelle) réalisée, c’est bien le mot STRESS qui revient comme « excuse » la plus fréquente. J’en veux pour preuve la 1ère raison qui pousse les footballeurs à me contacter pour solliciter un accompagnement en préparation mentale…pour « régler leur problème de stress ».

    Lors de nos premiers échanges, à la question: « pourquoi souhaites-tu faire appel à un coach mental? »; « En quoi puis-je t’aider? »; très souvent, j’obtiens ces même réponses: « je n’arrive pas à gérer mon stress »; « je stresse trop avant les matchs et cela me fait gaspiller beaucoup d’énergie »; « lorsque j’en parle à mon coach, il me dit de me calmer et que cela va passer au début du match »; « la veille des matchs, je dors mal, je m’énerve pour rien, j’ai du mal à manger… »; « je suis toujours trop stressé avant les matchs et cela m’empêche de me préparer dans des conditions optimales », « mon stress est trop intense, je n’arrive pas à l’éliminer et dans mon club personne ne peut m’aider», « je suis bon mais à cause du stress, je fais beaucoup d’erreurs »…

    Dans cet article, après avoir défini les différents termes évoquant le stress, je vais tenter d’expliquer le plus simplement et humblement possible, pourquoi, quand et comment émerge le stress d’avant match des footballeurs. Dans un 2ème temps, nous aborderons les différentes techniques que l’entraineur et/ou le préparateur mental peuvent utiliser pour armer au mieux ces joueurs afin de les conditionner avant un match important.

    Si l’on part du principe que le stress est un état que l’on ne peut maitriser, alors les fatalistes peuvent stopper ici la lecture de cet article. Pour les optimistes, les travailleurs, les curieux, les « ouverts », les progressistes…et tous les entraineurs qui souhaitent faire progresser leurs joueurs, poursuivons ensemble!

    Le stress fait partie intégrante de la vie de chaque être humain. La compétition sportive n’échappe pas à cette règle. Avant un match dit à enjeu, si une grande majorité de joueurs de football ressentent des douleurs physiques ou encore des pensées négatives et envahissantes les privant de réaliser un grand match, d’autres en revanche, parviennent à exploiter leur stress afin de réaliser des performances optimales et régulières. Ces 2 types de joueurs sont-ils différents ? Y a-t-il un caractère inné à la gestion du stress? NON, NON et encore NON. La gestion du stress ainsi que toutes les autres habiletés mentales (motivation, confiance, concentration…) sont modifiables, perfectibles et donc entrainables. Pour chaque habileté mentale, l’individu peut, avec un travail mental adapté et individualisé, faire progresser toutes les dimensions de son mental.

    Aujourd’hui, tous les entraîneurs, joueurs et tous les différents acteurs de la performance des footballeurs s’accordent pour affirmer que la capacité de gérer le stress avant, pendant et entre les matchs représente une caractéristique déterminante d’une performance de haut niveau

    Malgré cet état de fait, force est de constater que peu d’entraineurs ou de joueurs, consacrent suffisamment de temps pour apprendre, développer et utiliser des techniques de gestion du stress. Le manque de connaissances, de temps ou parfois même d’intérêt expliquent en partie cette absence de travail mental de la formation des jeunes jusqu’aux professionnels. Fort heureusement, appuyé par des validations scientifiques et les « preuves » (résultats) obtenues par ceux qui se sont risqués à programmer un travail mental avec leurs joueurs, il faut reconnaitre que le bon sens des acteurs du football français est en train d’accepter l’idée ( comme ce fut le cas pour la préparation physique) d’intégrer la préparation mentale des joueurs de football.

Commençons par le commencement…Qu’est-ce que le stress?

« Complete freedom from stress is death »  (= la délivrance complète du stress est la mort). SELYE

    Le « père » du stress, SELYE (1983), définit le stress comme « une réponse non spécifique de l’organisme à une demande qui lui est faite ». Il nomme cette « réponse » le syndrome général d’adaptation (SGA). Selon lui, tout est stress, à tel point que, l’individu n’a d’autre choix que de s’adapter en permanence aux agents stressants (ou stressors) correspondants aux stimuli de l’environnement mais également l’adaptation à des tensions internes (anxiété, faible estime de soi…).

    En d’autres termes, le stress est un processus et non pas un « état ». Le stress d’un individu est le résultat d’un décalage entre sa perception de la complexité de la situation à laquelle il est confronté et…sa perception de ses propres ressources permettant de répondre à cette situation. Un individu stresse lorsque son bien-être est menacé et qu’il pense ne pas posséder de réponse immédiate lui permettant de réduire cette menace. Cet « ajustement » est une réponse adaptative physiologique.

Ainsi, le stress évolue en 3 phases

    Phase 1 : La phase d’alarme: elle se caractérise par des symptômes physiques, lesquels alarment l’individu d’une anomalie de fonctionnement. Les premières réactions à l’agression apparaissent: le cœur s’accélère, la respiration est rapide et saccadée, des modifications de la répartition du sang apparaissent dans l’ensemble de l’organisme. Le système nerveux libère deux hormones bien connues : l’adrénaline et la noradrénaline. Ces hormones ont la faculté de mobiliser l’énergie dont l’individu pourrait avoir besoin par ailleurs.

    Phase 2 : La phase de résistance:  l’organisme mobilise toutes les défenses contre ce qui le stresse ( les agents stressants). Le corps finit par s’adapter aux stimuli. Cette fois, se sont les glucocorticoïdes qui sont sécrétées par le corps. Les glucocorticoïdes sont des corticostéroïdes qui ont une action sur le métabolisme protidique et glucidique, elles permettent de maintenir la production de glucose nécessaire aux muscles.

    Phase 3 : La phase d’épuisement: le sujet se sent incapable de lutter, ses limites de résistances sont atteintes. Le corps est envahi par le stress car les capacités de résistances sont dépassées. Le taux de glucose dans le sang diminue sensiblement. En parallèle, l’effet inhibiteur des glucocorticoïdes sur le système nerveux s’accroit car la production de ces hormones par le cerveau se prolonge. Cette situation fragilise le corps et facilite l’apparition des infections ou autres pathologies.

Comment le joueur réagit face au stress?

    En 1968, le physiologiste Claude Bernard a effectué des travaux sur les réactions des individus suite à une agression. Il en conclut que cette réaction individuelle a pour but le maintien de l’état d’équilibre interne, ce que le neurophysiologiste a qualifié d’homéostasie. Pour Cannon, il n’existe que 2 réponses comportementales face aux agents stressants: la LUTTE ou la FUITE.

 

FRIGHT ( = menace )     ⇒    FLIGHT ( fuite )   OR   FIGHT  ( lutte )


     Personnellement, je me permets de rajouter une 3ème réponse possible de l’individu. Cette réponse est la « non réponse », à savoir lorsque l’individu est face à une situation très stressante, et que celle-ci le bloque complètement, à tel point qu’il ne peut ni fuir ni lutter. Par ex, lorsqu’un individu apprend une terrible nouvelle, et qu’il ne fuit pas ou ne lutte pas…mais au contraire il ne fait rien, et reste bloqué voire immobile telle une statue.  Vous souvenez-vous de ce qui est arrivé à Thiago Silva, pourtant surnommé El Monstro, lors de la dernière coupe du monde « chez lui « ?

 

 

De quel stress parle-t-on ? Comment arrive le stress ?

    Le stress peut être biologique mais également psychologique. Il peut donc affecter le physique et/ou le mental. Tout dépend de la source du stress ainsi que de l’individu qui le reçoit. Par exemple, dans une équipe de football, avant un même match, certains joueurs auront mal au ventre, d’autres iront aux toilettes 4 fois en 30 minutes, certains ne dormiront pas bien la nuit précédente alors que d’autres auront des pensées négatives de type « je ne vais pas être bon demain »; « je vais encore faire une erreur grossière »; « en ce moment je ne suis pas bon »…, quand enfin, pour la même situation, d’autres seront totalement détendus et concentrés…ou plus simplement dans un état optimal leur permettant de réaliser une performance de haut niveau.

Lorsqu’ un individu stresse, que se passe-t-il au niveau physiologique ?

    L’adrénaline (sécrétée par les glandes médullo-surrénales), la noradrénaline (système parasympathique, terminaisons nerveuses), le cortisol ou la dopamine sont les principales hormones sécrétées. Elles stimulent la fuite ou le faire face à la situation stressante. Suite à cette sécrétion d’hormones, intervient une « déconnexion électrique » où l’amygdale (= le cerveau émotionnel) se déconnecte puis débranche le cerveau frontal (= zone de raisonnement) et perd momentanément ses capacités cognitives (= le joueur ne peut plus analyser objectivement et calmement la situation).

    Le stress est donc une évaluation cognitive, une perception que l’individu se fait de la situation. Ainsi,  SA perception de SA situation devenant SA réalité…seulement, cette réalité n’est pas forcément LA réalité. Lorsque l’individu est confronté à un évènement particulièr (se préparer pour jouer un match important), il analyse les ressources dont il dispose pour répondre à cette situation. Si ses ressources lui paraissent insuffisantes pour répondre favorablement à cette situation, alors le stress va apparaitre. On parle de « distress » (mauvais stress) qui est une conséquence d’un hyperstress ( trop de stress= agitation) ou d’un hypostress ( trop peu de stress=désintérêt, démotivation).

    En revanche, s’il pense avoir les capacités pour battre un adversaire, le match ne sera pas vécu comme stressant, le joueur fera face (coping de lutte) en s’engageant pleinement dans l’évènement. On parle ainsi d’ « eustress » ( = bon stress).

    De plus, dans l’absolu, rien n’est stressant. La situation en elle-même n’a aucune valeur concernant le stress, c’est plutôt la représentation que le joueur se fait de la situation qui a de la valeur..à ses yeux.

    Au final, il convient de retenir que ce qui est stressant, c’est la représentation que l’individu se fait de la situation à laquelle il est confronté. De fait, le stress peut donc être un activateur/booster ou un inhibiteur/limiteur de la performance future. En effet, tout dépendra de la perception puis de la conviction d’avoir les ressources nécessaires permettant de répondre favorablement au « stimulus-problème ». Compte tenu de ces propos, je tiens donc à affirmer cette grande erreur de considérer que le stress est souvent (toujours?)  vécu comme quelque chose de néfaste à la performance et contre lequel il faut lutter.

 

    Fin de la 1ère partie. Dans la 2ème partie, nous évoquerons les liens entre le stress et la performance des joueurs; comment se manifeste le stress et l’anxiété chez le joueur ainsi que les tests et outils permettant de mesurer le stress des joueurs avant un match.

 

 

 

Clément Durou

 

 

 

 

 

 

 

 

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